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« La Vie meilleure », d’Etienne Kern : la méthode Coué soigne toutes les plaies

« La Vie meilleure », d’Etienne Kern, Gallimard, 192 p., 19,50 €, numérique 13 €.
Sur une photographie trouvée sur Internet, Emile Coué (1857-1926), tout sourire, visage rondouillard, barbichette grise taillée à la serpe, a retiré son chapeau : il salue une foule que l’on devine sans la voir. Cet homme-là, au faîte de sa gloire, c’est l’inventeur de la méthode Coué, dont le principe consistait à répéter vingt fois, matin et soir, la formule suivante : « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. »
Soyons honnête, avant de lire La Vie meilleure, récit passionnant d’Etienne Kern, on ignorait tout de la vie d’Emile Coué, ce pharmacien né à Troyes qui consacra sa vie au « sauvetage moral des jeunes gens » et qui connut de son vivant une renommée mondiale. Il fit la une du New York Times lors de son arrivée sur le sol américain en 1926, vendit 100 000 exemplaires de son ouvrage La Maîtrise de soi par l’autosuggestion consciente (1922), et, à Moscou, on peut encore trouver un buste érigé à sa mémoire.
Aujourd’hui, son histoire est tombée dans l’oubli. Quant à sa méthode, elle a trouvé sa place dans le langage courant, mais elle n’a plus bonne presse : souvent moquée, on l’emploie par dérision ou ­désespoir, pour se convaincre que tout ira bientôt mieux quand rien ne va.
Il n’est pas très surprenant qu’Etienne Kern se soit intéressé au destin en dents de scie d’Emile Coué. L’écrivain et essayiste, né en 1983, l’avoue dans son livre : « Les perdants me fascinent. » Déjà, son premier récit, Les Envolés (Gallimard, 2022), racontait l’histoire d’une chute : celle de Franz Reichelt, un inventeur de parachute qui se tua en sautant de la tour Eiffel alors qu’il testait son nouveau matériel. Comme lui, Emile Coué est aussi tombé de haut.
Ecrit dans le sillage de Vies imaginaires, de Marcel Schwob (1896), et de certains récits de Pierre Michon, La Vie meilleure est un texte à plusieurs facettes, dans lequel l’auteur s’autorise aussi à parler de lui-même. C’est d’abord une biographie qui ne rechigne pas à recourir à la fiction pour donner des effets de réel à l’histoire, sans en déformer les faits. Car Etienne Kern s’est appuyé sur une solide documentation pour raconter l’aventure de cet apothicaire qui voulait devenir un guérisseur d’un genre nou­veau. « Petit professeur d’optimisme » pour certains, « charlatan » pour d’autres.
Précurseur des médecines douces et du développement personnel, Emile Coué est convaincu que le bonheur et la santé dépendent d’un choix qui nous est propre. « Le maître mot : l’imagination, il faut se penser mieux que nous sommes. » Grâce à l’hypnose, il découvre d’abord que le pouvoir de la suggestion peut soigner « les petits troubles de l’esprit, pas les cancers ou les fractures ». L’étape d’après, qui donnera naissance à sa méthode, c’est l’autosuggestion. De fait, plus besoin de médiation : chacun doit trouver en soi ces petites phrases positives pour s’aider à se projeter dans l’existence.
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